Certes, l’expression est normalement dédiée à notre « Johnny national ». Toutefois, le personnage qui nous intéresse ici ne vole en rien ce sobriquet. En effet, la jeunesse, James Dean l’a personnifiée et il continue encore, d’une certaine manière, à l’incarner, soixante ans après sa disparition.
Une étoile filante symbole d’une nouvelle culture
Balloté entre son Indiana natal et la Californie durant son enfance puis son adolescence, « Jimmy » abandonne rapidement son droit entamé à Santa Monica à tout juste 18 ans. Et pour cause, il entend poursuivre son rêve, embrasser une carrière d’acteur. Il faut dire que sa mère, jusqu’à sa disparition prématurée, n’a eu de cesse de cultiver les prédispositions artistiques de son rejeton.
Peu assidu à l’Actors Studio où il s’est inscrit, les premiers temps sont forcément constitués de vaches maigres. Il enchaîne les publicités et les petits rôles dans des séries quelconques. Mais le jeune homme va faire sa première rencontre avec le succès au théâtre, à Broadway, dans L’immoraliste, pièce du prix Nobel de littérature français André Gide. Le fameux réalisateur Elia Kazan le repère même, n’imaginant que lui pour incarner Cal Trask dans son prochain film À l’est d’Eden, issu du livre éponyme de John Steinbeck, fameux auteur appartenant à la « génération perdue ».
- James Dean dans ‘À l’est d’Eden’ (1955)
- James Dean et Natalie Wood sur le tournage de ‘La Fureur de Vivre’
- Une des nombreuses scènes de bandes visibles dans ‘La Fureur de Vivre’ (1955)
- James Dean se prélassant dans une Rolls-Royce Silver Ghost de 1920, lors du tournage du film ‘Géant’
- Malgré une ambiance de tournage délicate, James Dean sera de nouveau nominé pour l’Oscar du meilleur acteur à titre posthume, pour sa prestation au côté de Liz Taylor. Cela n’est arrivé à aucun autre acteur
- James Dean et sa Porsche 550 Spyder quelque temps avant sa disparition. © Bettmann/Corbis
Pour ce premier rôle au cinéma, qui lui semble taillé sur mesure – entre enfance rurale, distance du père et manque de la mère – James Dean se voit nominer aux Oscars 1956 dans la catégorie du meilleur acteur. Une grande première dans l’histoire qui le catapulte littéralement dans la légende hollywoodienne. Dans le même temps, il s’illustre dans La Fureur de Vivre de Nicholas Ray, qui fera de lui, l’étendard d’une jeunesse d’après-guerre en quête d’émancipation.
Mais alors que sa renommée bat son plein à tout juste 24 ans – il a déjà signé un juteux contrat d’exclusivité avec la Warner – et qu’il vient de boucler le tournage de Géant aux côtés d’Elizabeth Taylor et Rock Hudson, son destin bascule tragiquement dans la monotonie d’une longue ligne droite californienne baignée d’une lumière pas tout à fait crépusculaire. Sa rutilante Porsche 550 Spyder n’a pu faire le poids face à la massive Ford Sedan venue lui couper la route au niveau de l’intersection de Cholame. L’acteur rejoignait alors le circuit de Salinas pour disputer une course automobile ; sa deuxième passion. Ce qui n’est pas sans rappeler une autre grande figure de la culture américaine de la deuxième moitié du XXème siècle…
Des similitudes avec The King of Cool
Cette autre personnalité, c’est bien évidemment Steve McQueen. Les ressemblances entre les deux hommes sont assez stupéfiantes. D’origines sociales modestes, ils ont tous les deux grandi dans les plaines de l’Indiana avant de battre le pavé de la « Cité des Anges », le tout, en traînant le fardeau de l’absence parentale.
Vient ensuite la passion des objets roulants et de la compétition automobile plus particulièrement. James Dean aura d’ailleurs eu le temps durant sa fugace existence, de montrer des qualités indiscutables au volant et de s’illustrer lors de quelques courses, comme son aîné.
- James Dean adossé à sa Porsche 356 Speedster. Un modèle que possédait également Steve McQueen
- Avant de s’enticher de sa Porsche 550 Spyder, l’acteur/pilote avait pris commande d’une surprenante Lotus Mark IX Climax. Une auto faite pour la compétition
- James Dean se trouve ici au volant d’une merveilleuse Ferrari 500 Mondial, en 1955
Puis, en bousculant les codes de leur époque – James Dean est considéré comme un avant-coureur de la « culture pop », pour sa représentativité contestataire – ils ont tout simplement atteint le statut d’emblème pour plusieurs générations. Leur apparence stylistique, soigneusement décontractée et détachée des usages formels de l’époque, semble par ailleurs aller dans ce sens. On peut y percevoir la volonté de ne jamais se départir de leurs origines rurales, mettant à mal la préciosité ambiante de l’âge d’or hollywoodien.
Enfin, comment ne pas évoquer leur personnalité tourmentée, à fleur de peau ; l’instabilité de leurs relations sentimentales ayant pu les plonger tous deux dans de profondes affres.
- Les nombreux clichés des deux hommes à bord de leurs bolides respectifs ont pu contribuer à en faire des hérauts d’une certaine quête de liberté
- A deux roues ou à quatre, le plaisir de conduite était le même pour l’acteur américain
- Sa relation impossible avec l’actrice Pier Angeli fut une terrible épreuve pour James Dean
- Inséparable de sa Westclox Wrist Ben et son boîtier en forme de tonneau
- James Dean possédait également une LeCoultre Powermatic Nautilus
- David Loehr a créé une immense galerie exclusivement dédiée à James Dean
Une agrégation de caractères qui peut finalement expliquer la force des symboles qu’ils ont pu représenter et qui perdurent encore aujourd’hui. On a pu voir précédemment que de nombreuses marques recouraient à l’image de Steve McQueen. Il en est de même pour James Dean, dont le nom peut tout à la fois désigner une marque de lunettes ou faire référence à un horloger par exemple. En 2004, il a par ailleurs été estimé que l’image de l’acteur avait généré 5 millions de dollars de revenus.
De manière plus figurative, l’érection d’un mémorial dans sa ville natale voilà une semaine ou la sortie en salles dans le même temps du film Life d’Anton Corbijn, qui s’est inspiré de l’ascension de James Dean, viennent bien illustrer la survivance du personnage.