
La finale de la 62ème Ligue des Champions s’est tenue samedi soir au Millenium Stadium de Cardiff. Elle opposait deux équipes alors tout juste auréolées du titre de champion national : Le Real Madrid et la Juventus Turin. L’issue de cette confrontation paraissait donc incertaine aux dires des bookmakers. Le cours du match en a décidé autrement, les merengues étrillant finalement la Vieille Dame sur le score de 4 buts à 1.
Il semblerait naturel de décortiquer ce formidable doublé madrilène qui vient porter aux nues un jeune entraîneur, Zinédine Zidane. Peu nombreuses sont en effet les figures qui ont été capables de briller successivement avec la liquette immaculée sur le dos, puis la casquette d’entrenador sur la tête. Miguel Muñoz – treize championnats et cinq coupes d’Europe cumulées entre 1954 et 1972 en tant que joueur puis entraîneur – ou Alfredo Di Stéfano, autre légende du club ayant gouté aux deux fonctions, n’y sont jamais parvenus. Il faut remonter à José Villalonga en 1957 et Luis Carniglia en 1958 pour trouver trace d’un tel doublé…
La motivation de ce billet est cependant davantage rattachée au perdant de cette soirée, la Juventus. Car avant de s’écrouler lors du deuxième acte, cette valeureuse Vieille Dame n’a pas manqué de malmener l’équipe espagnole avec en point d’orgue, cette réponse hallucinante de Mario Mandžukić à l’ouverture du score de Cristiano Ronaldo. Une série de quatre touches de balle dans la surface madrilène, comme en apesanteur, mêlant Alex Sandro, Gonzalo Higuain et le croate, qui ponctue finalement le tout d’un retourné acrobatique aux quinze mètres qui mystifie Keylor Navas, un peu court.
On a pu dès lors saisir immédiatement la portée de cette action. Outre le fait qu’elle venait intensifier encore un peu plus un match déjà parti sur les chapeaux de roues, elle offrait par-dessus tout une place de choix à cette finale dans l’histoire de la compétition.
Un chef-d’oeuvre fait le plus souvent fi de l’enjeu du match pour s’incruster dans les mémoires. Ce qu’ont pu nous enseigner le but de Zlatan Ibrahimovic avec la Suède face à l’Angleterre ou encore le coup du scorpion de René Higuita avec la Colombie, contre l’Angleterre encore une fois, en amical toujours. Lorsqu’il s’immisce dans le cadre suprême d’une finale de Ligue des Champions, il se pare d’une dimension presque sacrale, emportant son instigateur au firmament de son art. C’est ce qui s’est produit pour Zinédine Zidane, le 15 mai 2002. Ce soir-là, reprenant un centre en cloche de Roberto Carlos, le meneur de jeu français crucifie le malheureux Hans-Jörg Butt et offre une neuvième Ligue des Champions au Real Madrid.
Mais bien d’autres footballeurs ont pu être touchés par la grâce, un soir de finale de la compétition reine du football européen. F&G vous en propose ici un florilège.
Benfica Lisbonne 3 – 2 FC Barcelone
31 mai 1961, Stade du Wandkorf, Berne :
Mário Coluna (2:10) ; Zóltan Czibor (3:15)
http://www.youtube.com/watch?v=_RVLMqiBHPk
Le génial gaucher hongrois réplique ici magnifiquement au portugais – qui termina sa carrière à l’Olympique lyonnais – dans un concours de reprises de volée
Atlético Madrid 0 – 4 Bayern Munich
17 mai 1974, Stade du Heysel, Bruxelles :
Gerd Müller (0:50 & 1:38)
Lors de cette finale rejouée deux jours après une première confrontation achevée sur un score de parité (1-1), les bavarois écrasent leurs rivaux espagnols, portés par un phénoménal Gerd Müller. Ce soir-là, der Bomber inscrit deux buts somptueux, l’un en force, l’autre d’un lob soyeux
Hambourg SV 1 – 0 Juventus Turin
25 mai 1983, Stade Olympique, Athènes :
Felix Magath (0:30)
Au sommet de son histoire, le HSV se débarrasse de la Juventus Turin et de ses Ballons d’Or Paolo Rossi et Michel Platini, grâce au miraculeux pied gauche de Magath, qui vient tromper Dino Zoff en tout début de partie
Bayern Munich 0 – 1 FC Porto
27 mai 1987, Stade du Prater, Vienne :
Rabah Madjer (0:12)
Un geste en apparence anodin, pourtant génial, qui va transformer le patronyme de son auteur, Rabah Madjer, en antonomase. Et ça, peu de footballeurs peuvent s’en targuer
Steaua Bucarest 0 – 4 AC Milan
24 mai 1989, Camp Nou, Barcelone :
Ruud Gullit (1:50)
http://www.youtube.com/watch?v=UursGL-Up3I
Les rossoneri marchent sur la planète football en cette toute fin de décennie 80, grâce notamment à son trio néerlandais van Basten, Rijkaard, Gullit. Ce dernier, auteur d’un doublé face aux surprenants roumains du Steaua, en profite pour étaler toutes ses qualités techniques, au rythme de la valse de ses Dreadlocks
AC Milan 4 – 0 FC Barcelone
18 mai 1994, Stade Olympique, Athènes :
Dejan Savićević (9:50)
http://www.youtube.com/watch?v=Dd3jzD-3tLY
Cinq ans plus tard, on retrouve à nouveau le Milan AC. Cette fois, l’équipe entraînée par Fabio Capello fait encore plus fort en infligeant une franche humiliation au FC Barcelone de Johan Cruyff, vainqueur de la compétition en 1992. Le lob surréaliste du maestro Dejan Savićević constitue assurément le summum de cette démonstration historique
Borussia Dortmund 3 – 1 Juventus Turin
28 mai 1997, Olympiastadion, Munich :
Alessandro Del Piero (4:30) ; Lars Ricken (5:15)
http://www.youtube.com/watch?v=dUJB_80-iJ8
La Juventus tombe sur plus fort qu’elle cette année-là : le Borussia Dortmund d’Ottmar Hitzfeld. Une victoire indiscutable du BVB, notamment agrémentée d’un lob audacieux de Lars Ricken, sur un contre éclair. Le geste de la finale revient cependant à Alessandro Del Piero. À même pas 23 ans, Pinturicchio annonce le fuoriclasse qu’il deviendra en plaçant une formidable « madjer ». Un joli clin d’oeil à l’attaquant algérien qui marquait les esprits dix ans plus tôt avec ce fameux coup de patte
Bayer Leverkusen 1 – 2 Real Madrid
15 mai 2002, Hampden Park, Glasgow :
Zinédine Zidane
C’est LE but qui revient irrémédiablement dès que l’on parle de moments de grâce vécus en finale de Ligue des Champions. Outre sa pureté technique difficilement égalable, cette reprise de volée s’est chargée dans le même temps d’une profonde dimension symbolique en émanant d’un joueur devant tout à la fois légitimer son statut de meneur de jeu salvateur acquis un certain 12 juillet 1998, en plus de justifier un transfert estival record (75 millions d’euros)
AC Milan 3 – 3 FC Liverpool (2-3 TAB)
25 mai 2005, Stade Olympique Atatürk, Istanbul :
Steven Gerrard (3:56 mais le résumé dans son ensemble mérite d’être visionné !)
http://www.youtube.com/watch?v=fCkbw2x_OZI
Un scénario rocambolesque pour l’une des plus belles finales de l’histoire de la compétition. Le but de Gerrard peut apparaître relativement banal. Il n’en est rien. Le centre diablement précis d’un John A. Riise se désarticulant pour servir son captain qui vient battre d’une tête venue d’ailleurs un Dida impuissant malgré son mètre 96, condense toute l’abnégation qui a permis aux Reds de renverser une situation désespérée
FC Barcelone 2 – 0 Manchester United
27 mai 2009, Olimpico, Rome :
Lionel Messi (3:54)
http://www.youtube.com/watch?v=jcz_0KQ5y7U
Ce but pourrait prendre les traits d’une allégorie footballistique de l’affrontement biblique de David contre Goliath ; Lionel Messi (1m70) se débarrassant malicieusement du marquage de Rio Ferdinand (1m93) pour venir lober de la tête Edwin van der Sar (1m97)
Juventus Turin 1 – 4 Real Madrid
3 juin 2017, Millenium Stadium, Cardiff :
Mario Mandžukić (2:15)
http://www.youtube.com/watch?v=SKISasU05-U
« Les Trois Grâces ». On pourrait reprendre ce titre d’un tableau fameux de Raphaël pour le compte de cette série d’enchaînements de grande classe des joueurs bianconeri