
Maurice Trintignant réalisa ses plus beaux faits d’armes au volant des bolides rouges d’Enzo Ferrari, qui le surnommait affectueusement le « marchand de pinard », en écho à ses activités de vigneron
Maurice Trintignant, qui aurait fêté ses cent ans cette semaine, appréhendait le sport automobile comme une passion des plus simple – prenante certes -, mais qui ne méritait toutefois pas d’y sacrifier sa vie. Une posture qui, si elle ne lui a peut-être pas permis d’exploiter tout son potentiel, lui a à tout le moins offert la grâce d’échapper au funeste destin réservé à une part importante des pilotes de son époque, devenant ainsi un protagoniste récurant du paysage automobile d’après-guerre.
Maurice Trintignant, c’est avant tout une incroyable longévité au plus haut niveau. Après quelques premières courses à la fin des années 30, le natif de Vergère truste les paddocks professionnels de la fin des années 40 jusqu’à 1965.
Une plage conséquente au cours de laquelle il a pu courir pour pas moins de douze constructeurs différents ; entre Ferrari, Maserati, Cooper, Vanwall, Aston Martin, BRM, Lotus, Lola, Porsche, Ford, Simca-Gordini ou encore Bugatti. Une accumulation qui laisserait penser le pilote tricolore quelque peu mercenaire. Il n’en n’est rien. Derrière cette litanie se cache en effet un homme attaché à sa contrée d’origine. Ainsi, à l’issu de la saison 1955 de Formule 1, qu’il termine au pied du podium derrière Fangio, Moss et Castellotti, et devant son coéquipier Giuseppe Farina, il quitte à la surprise générale la Scuderia Ferrari pour rejoindre le mythique constructeur français Bugatti qui entend réinvestir la compétition pour se sortir d’une mauvaise passe. L’aventure est hélas de courte durée. La séduisante Type 251 ne donne guère satisfaction dès sa première apparition au Grand Prix de France. Ce choix du coeur va peser lourd sur sa carrière, qui marque un coup d’arrêt. Ses tentatives de rebonds chez Vanwall, puis son retour chez Ferrari notamment, sont vains. Seule l’écurie britannique de John Cooper va lui octroyer un dernier baroud d’honneur dans la discipline, à la fin des années 50.
- En 1955, Maurice Trintignant devient le premier vainqueur français du Grand Prix de Monaco. Tout au long de sa carrière, il s’est avéré être redoutable sur les circuits urbains hexagonaux, qui semblaient le transcender
- Lors de son unique sortie à Reims, à l’occasion du Grand Prix de France 1956, l’atypique Bugatti Type 251 ne s’est pas vraiment montrée à la hauteur, signant alors l’échec de la collaboration entre le pilote et le constructeur français
Cet attachement à tout ce qui se rapporte à son pays est d’ailleurs perceptible jusqu’à son palmarès. Il est ainsi devenu le premier pilote français à s’imposer sur le tracé du grand prix de Monaco en 1955. Une performance qu’il parvient à réitérer trois ans plus tard durant son sursaut d’orgueil chez Cooper. Hors championnat, il multiplie les victoires aux quatre coins de l’Hexagone, que ce soit à Pau, à Reims, à Caen ou encore à Angoulême.
Le constat ne varie pas en catégorie sport. Fort d’une quinzaine de participations aux 24 Heures du Mans, Maurice Trintignant conquiert le titre 1954 à bord d’une Ferrari 375 Plus partagée avec l’argentin José Froilán González. Il fleurit ensuite son histoire mancelle de deux podiums complémentaires en 1956, toujours sur Ferrari – cette fois une 625 LM -, et en 1959, au volant d’une somptueuse Aston Martin DBR1.
- À 48 ans et pour sa dernière participation aux 24 Heures du Mans en 1965, Maurice Trintignant a partagé cette Ford GT40 Roadster avec Guy Ligier
- Maurice Trintignant a remporté les 24 Heures du Mans 1954 en duo avec l’argentin José Froiláns González, sur Ferrari 375 Plus
Retiré dans ses vignes gardoises jusqu’à sa disparition en 2005, Maurice Trintignant ne rechigne pas à renouer avec le frisson du pilotage par le truchement de diverses manifestations historiques. Il ne manque pas non plus de promouvoir le pilotage français en parrainant notamment un certain Jean Alesi à ses débuts ou encore son neveu Jean-Louis Trintignant, qui s’essaya à la compétition automobile avant de devenir l’acteur majeur que l’on connaît.

Une statue en bronze lui a été dédiée à Vergèze, où il possédait son havre de paix gardois



