
Egon Schiele – Autoportrait (aux Physalis Alkekengi) (1912) © Leopold Museum, Wien
Moser, Klimt, Schiele, Hodler. Ces quatre peintres ont largement contribué au foisonnement artistique de leur temps. La marche entre la fin du XIXème et le début du XXème siècle a en effet vu naître une multitude de mouvements aspirant à remettre en question le classicisme et par ce truchement, les conventions sociales du moment, le tout, sous l’impulsion des chambardements du modernisme.
Les trois premiers, autrichiens, ont tous été rattachés à un moment de leur vie, à la Seccezion Viennoise, venue se positionner à rebours de l’académisme lumineux prodigué par ce phare artistique d’Europe centrale que constitue la capitale autrichienne, dans le sillon de l’art nouveau, au firmament en ce début des années 1900.
Ces artistes demeurent toutefois véritablement hétéroclites dès lors que l’on observe la globalité de leur parcours. Ils n’ont en effet eu de cesse d’explorer au fil du temps de nouvelles pistes, de nouveaux horizons, comme pour échapper au conformisme inhérent à toute incorporation dans un mouvement, cadre véritablement contraignant.
Egon Schiele en est un probant exemple. Il s’est ainsi successivement inspiré du Jugendstil, des Cavaliers Bleus, d’obédience plus expressionniste ou encore du Sema munichois, sans oublier l’influence déterminante de Klimt. Ce ferment fécond a ainsi pu contribuer à la puissance de son œuvre, sombre, torturée, voire dérangeante, qui lui valut l’opprobre des tenants du classicisme viennois.
Gustav Klimt a de son côté connu un parcours différent, moins fulgurant, quoique tout à fait remarquable. Son cheminement artistique s’est articulé autour de plusieurs dynamiques successives. Il se fait tout d’abord connaître comme décorateur, où son travail académique est largement salué, récompensé même par les institutions de son pays (l’Empereur François-Joseph Ier lui remet la Croix d’Or du Mérite Artistique en 1888). Une reconnaissance qui ne l’empêche pas de s’installer par la suite dans les cahotements du début du XXème siècle en devenant une figure prépondérante de la Seccezion Viennoise. Ses œuvres – notamment La Philosophie – La Médecine – La Jurisprudence (1900-1907) – deviennent même sujet à controverses, lui qui fut le héraut d’un art autrichien conventionnel. S’éloignant en fin de compte du mouvement qu’il a porté, il acheva sa carrière dans un style plus épuré, tourné vers les paysages et les couleurs vives.
Ferdinand Hodler, bien que suisse, ne dénote en aucun cas de ses confrères autrichiens, en embrassant le symbolisme porté par Klimt, qui lui fait connaître le succès avec La Nuit notamment. Il entretient par ailleurs une relation d’influence réciproque avec un autre autrichien tout aussi lié à Klimt et à la Seccezion Viennoise : Koloman Moser.
Ces peintres, finalement réunis par leur sensibilité artistique, l’ont hélas aussi été de par leurs disparitions brutales, prématurées, à une époque où, en marge de la « Grande Guerre » qui s’achève alors, les épidémies sévissent avec autant de vigueur et les maladies demeurent impitoyables. Schiele sera emporté par la grippe espagnole à seulement 28 ans. Moser, Klimt et Hodler succomberont eux de maladies à respectivement 50, 55 et 65 ans.

Gustav Klimt – Judith II (Salome) (1909) © Ca’ Pesaro, Galleria Internazionale d’Arte Moderna, Venice