M. Zagallo, F. Beckenbauer, Messieurs Mondial

Comme dans toute galaxie, les étoiles les plus scintillantes se meurent aussi vite que les nouvelles n’éclosent. Cette année 2024 s’est ainsi soudainement emparée du destin de deux gloires du football moderne ; Mario Zagallo et Franz Beckenbauer avaient respectivement 92 et 78 ans.

Ces deux protagonistes d’envergure partagaient la singularité d’avoir été sacrés champion du monde à la fois comme joueur et en tant que sélectionneur, preuve s’il en est d’une longévité certaine dans les plus hautes sphères de l’intraitable planète foot. Un cénacle partagé depuis 2018, avec un certain Didier Deschamps.

Le premier, brésilien d’origine libanaise (son véritable patronyme était Zakour) a fait parti de tous les succès mondiaux de la Seleção au XXème siècle. D’abord ailier travailleur au cours des épopées 1958 et 1962 pour laisser le champ libre à Nilton Santos – sorte de père spirituel de Roberto Carlos et Marcelo –, réputé pour ses déboulés sur le flanc gauche du terrain, Zagallo est ensuite devenu le sélectionneur de l’équipe de rêve de 1970, remettant notamment en selle un certain Pelé alors resté échaudé par la brutale et catastrophique Coupe du Monde 1966. Après un retour en qualité d’adjoint au sein de l’équipe victorieuse en 1994, il hissa une nouvelle fois les Auriverde au sommet mondial quatre ans plus tard, butant finalement sur une valeureuse équipe de France qui a alors pour capitaine, Didier Deschamps – destins croisés.

Loin d’être exubérant, détonnant même dans l’environnement incandescent du football brésilien, Zagallo a su dompter des armées de solistes fantastiques (Pelé, Rivelino, Jairzinho, Romario, Bebeto, Ronaldo, Rivaldo etc.) pour édifier des collectifs inébranlables. Son omniprésence dans les grands moments footballistiques du Brésil ne peut en rien être due au hasard.

A contrario, Franz Beckenbauer pourrait ici témoigner de qualités le plus souvent attribuées aux footballeurs brésiliens ; technique soyeuse, attrait offensif certain pour un milieu de formation devenu défenseur, l’influence de ce munichois pur sucre s’en est trouvée double. Elle a d’abord débuté à l’échelle nationale lorsque, jeune espoir prometteur, il choisit de rejoindre le Bayern Munich, alors club de seconde zone bavarois, au détriment du prestigieux TSV Munich 1860. Chef d’une meute talentueuse composée des Maier, Schwarzenbeck, Breitner, Hoeness et Müller, voilà le Bayern emmené sur le toit de l’Europe dès le milieu des seventies.

Une influence finalement devenue globale au travers de la consécration qu’il apporta au poste révolutionnaire de libéro, où son sens de la contre-offensive a pu faire des merveilles. Une tradition par la suite perpétuée outre-Rhin avec Lothar Matthäus dans les années 80, puis Matthias Sammer dans les années 90, le tout ne représentant pas moins de quatre Ballons d’Or à eux trois !

La légende de Franz Beckenbauer s’est notamment façonnée lors de la Coupe du Monde 1970, au cours de laquelle il termina la 1/2 finale d’anthologie perdue par la RFA face à l’Italie le bras en écharpe par suite d’une fracture de la clavicule… / Comme bon nombre de grands joueurs ayant ouvert la voie aux destinations exotiques, l’allemand a vécu son rêve américain en rejoignant les Cosmos de New-York dans les années 70, ici en compagnie de Pelé et Chinaglia. / L’expérience avortée de Beckenbauer sur le banc de touche de l’Olympique de Marseille entre 1990 et 1991 a été l’un des grands regrets de sa carrière ; il n’y avait pas de place pour deux empereurs sur les bords de la Canebière…

Une fois les crampons raccrochés au terme d’une dernière pige hanséatique, le Kaiser s’est illustré à la barre de l’intraitable Mannschaft venue à bout d’une Squadra Azzura chauffée à blanc sur ses terres, en finale du Mondial 1990.

S’éloignant finalement rapidement des bancs de touche consécutivement à une expérience marseillaise désastreuse, l’ombre gigantesque de Franz Beckenbauer n’a depuis lors jamais cessé de planer dans les travées des instances du football germanique.

Début des 70′, une époque où entraîner en survet’ ne contrevenait pas à l’élégance…

Laisser un commentaire