Centenario Giovanni «Gianni» Agnelli

Industriel puissant, figure politique et mondaine incontournable, Giovanni Agnelli était omniprésent dans la société italienne de la deuxième moitié du XXème siècle. Presque vingt ans après sa disparition, ce fier turinois, parfaitement intégré à l’élite mondiale, demeure encore aujourd’hui une véritable icône stylistique. Symbole d’une flamboyance révolue, il témoigne surtout de la survivance d’un italianisme contemporain.

Un golden-boy du XXème siècle

Héritier de l’empire FIAT fondé par son grand-père – dont il partage le même prénom – à la toute fin du XIXème siècle et qui s’est considérablement développé au cours des décennies qui ont suivi, particulièrement durant les conflits mondiaux, Gianni Agnelli s’apparente à un produit du futurisme italien et de la mondialisation galopante du XXème siècle : vitesse et action l’animent. Sa prise de commande du groupe familial à l’âge de 45 ans scelle d’ailleurs cette dynamique, le constructeur turinois partant immédiatement à l’assaut du globe, des États-Unis jusqu’à l’URSS notamment, en passant par l’Amérique du Sud et l’Asie.

Une frénésie tout aussi tangible à titre personnel. Suivre l’Avvocato une journée pouvait ainsi vous faire rejoindre Paris depuis Turin en passant par la Côte d’Azur, à l’allure folle déployée par les V12 de ses Ferrari, avant une envolée vers les cimes des Alpes en hélicoptère, pour finalement rattraper les bords de la Méditerranée depuis lesquels il prenait le large à la barre d’un de ses nombreux – et somptueux – yachts. Agnelli a été de cette génération boulimique de conquêtes et de frissons, que rien n’effrayait, sinon l’immobilisme et l’inaction.

Pour en attester, ce passionné de conduite, qui a toujours refusé de se laisser promener par un chauffeur, prenait plaisir à malmener ses passagers autant que les modèles qui sortaient des chaînes de montage de ses usines turinoises ou avoisinantes. Esthète s’il en est, il a également été l’un des plus fervents instigateurs des créations sur-mesure que les designers vernaculaires ont pu imaginer, offrant ainsi pour l’éternité des Ferrari, Lancia ou Fiat uniques en leur genre.

Sprezzatura et supplément d’âme italien

Aussi à l’aise pour recevoir les têtes couronnées dans sa villa Leopolda de Villefranche-Sur-Mer ou sur ses terres à Villar Perosa, que pour déblatérer autour de sa Juventus adorée avec les ouvriers du Lingotto, siégeant tout à la fois au comité de direction du Groupe Bilderberg ou à la Confindustria, qu’en tête de la municipalité de son village natal, sa personnalité affable et caustique séduisait partout où sa silhouette électrisante défilait.

D’aucuns désigne parfois le « style Agnelli » comme une illustration de la Dolce Vita. Une image quelque peu trompeuse tant son rythme de vie effréné – quoiqu’hédoniste, certes – se voulait à rebours de tout idée de quiétude. Son aventure avec Anita Ekberg et son amour du cinéma de Federico Fellini y ont finalement sans doute davantage contribué.

Le savant mélange de flamboyance et de liberté qui le caractérisait le rapprocherait sinon de la fameuse Sprezzatura chère à nos voisins transalpins. Rares ont en effet été les hommes capables d’assumer avec un certain panache, ces quelques twist stylistes qui ont fait sa renommée. Porter des boots de type montagnardes – comme pour marquer un peu plus son enracinement piémontais – avec des costumes en flanelle ou solaro à la belle saison, croisés ou droits, confectionnés par les plus grandes maisons (Huntsman & Sons à Londres ou Caraceni à Milan notamment) ne lui faisait pas peur, le tout ponctué d’une cravate toujours parfaitement déséquilibrée. De même, il avait l’habitude d’orner le poignet gauche de ses chemises – blanches ou bleues à col button down volontairement détaché, provenant le plus souvent de chez Brooks Brothers – d’une montre. Un assemblage déroutant, quelque peu pittoresque qui, collant à sa vie menée tambour battant, exhalait en définitive un certain naturel. Le charisme en somme.

Souvent imité, jamais égalé, son disciple le plus convaincant ne serait-il en fin de compte pas Lapo Elkann, son petit-fils, réputé pour ses tenues extravagantes, bien que toujours respectueuses des préceptes sartoriaux ; ou quand l’innée s’invite dans le style.

Parmi les montres que L'Avvocato se plaisait à exhiber sur ses manches de chemise, pouvaient se succéder une Audemars Piguet Perpetual Calendar Pocket - montre de proche transformée ici en montre-bracelet -, une Patek Philippe World Time – la moindre des choses pour un tel globe-trotter - ou encore des modèles d’allure plus moderniste tels qu'une Omega Seamaster Polprof

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